Dans le 7ème arrondissement de la ville de Marseille, capitale du jaune et de la pétanque, se trouve un quartier un peu particulier, un endroit sans voitures, riche d’un patrimoine historique exceptionnel, et d’un calme absolu face à la frénésie de la ville ….
Ce quartier, appelons-le comme ça, se trouve entouré d’eau et est « culminé » par un château, bien connu des marseillais et d’Edmond Dantès, personnage du Compte de Monte Cristo, une oeuvre d’Alexandre Dumas. Il s’agit bien évidemment du château d’If !
Vous l’aurez compris, aujourd’hui nous mettons le cap sur les îles du Frioul !
Le Frioul c’est un archipel de 4 îles : Pomègues au sud, Ratonneau au nord, If à l’est sur lequel trône fièrement le château éponyme et enfin l’îlot Tiboulen, petit bout de terre à l’ouest de Ratonneau. Ces quatre îles sont administrées par la ville de Marseille.
Pomègues et Ratonneau sont reliées par la digue Berry, qui a été construite dès 1822 sous Louis XVIII. Ces deux grandes îles, reliées entre elles, représentent plus de 200 hectares de terres calcaires.
Pour atteindre l’archipel, il faut se rendre sur le vieux port de Marseille, de là, une navette affrétée par la RTM vous emmène, moyennant la coquette somme de 11€90, à quelques 3/4 km à l’ouest de la côte direction If et Ratonneau. Renseignez-vous sur la météo, le service peut être interrompu en cas de fortes houle !
Après une vingtaine de minutes de traversée, nous arrivons sur l’île de Ratonneau, là où se trouve les seules habitation et restaurants de l’archipel se concentrent sur le port. Quelques 150 âmes vivent ici à l’année, ayant troqué les pleins services qu’offrent la ville contre la tranquillité et la solidarité de la vie en retrait.
Les deux îles, à la fois calcaires et sèches, nous offrent une blancheur époustouflante contrastant avec le bleu turquoise de la mer et le vert des quelques espèces végétales assez téméraires pour survivre dans ce milieu aride. Il s’agit d’un des lieux les plus sec et désertiques de France, on y a relevé le taux de sécheresse le plus haut, d’autant plus lors de la saison estivale.
On peut apercevoir la mer en presque tout point des deux îles, parfois des plages, parfois des calanques où se rassemblent des baigneurs venus profiter de la beauté et de la sérénité des lieux, ou bien des falaises inaccessibles, abruptes et érodées par la mer et les embruns au fil des années et plongeant dans l’eau.
Ce qui marque au Frioul c’est la sensation de se sentir seul et isolé, nous avons eu l’occasion de dormir sur l’île (De manière légale et conventionnelle, le camping sauvage y étant interdit). Les balades nocturnes, au clair de pleine lune, une fois la dernière navette partie, changent totalement de l’ambiance en journée. La nuit, il n’y a plus grand monde sur l’île et il suffit de s’éloigner du front de mer pour se sentir retiré du monde, perdu et entouré par la mer qu’on entend mais peine à distinguer clairement, contrairement à la roche blanche, renvoyant merveilleusement les rayons de lune venus la frapper.
Si le vent n’est pas de la partie, ce qui fut notre cas, bien que ça soit plutôt rare au Frioul, le murmure des vagues accompagne cette solitude. Seuls les goélands, dérangés par notre passage, viennent percer ces fracas harmonieux.
Toute personne ayant visité l’île s’en est rendue compte; Les humains ne sont pas les seules habitants de l’île, d’autres habitants y demeurent et se font entendre !
L’archipel abrite une énorme population de goéland leucophée, qu’on appelle localement les « Gabian ». En fonction de l’époque à laquelle vous vous rendez sur l’île, vous pourrez croiser (et même surement vu le nombre) les oisillons qui ne volent pas encore et au plumage tout grisatre.
Faites attention si vous vous éloignez des sentiers balisés, les goélands nichent absolument partout et les parents veille à ce que personne ne s’approchent de leur progéniture. Ils peuvent se montrer menaçant !
L’île possède une végétation méditerranéenne et aride et abrite même quelques espèces endémiques. Il faut savoir que les précipitations y sont très faibles l’été et la sécheresse est de mise. A cela s’ajoute le vent marin chargé en sel, grillant toute forme de plante non adaptée à ce milieu.
Bien sûr quelques plantes et arbres robustes y survivent, souvent abrités du vent par des parois rocheuse. mais certaines plantes n’ont pas eu la chance de germer au bon endroit, à l’image de ce pin parasol « couché » car la moindre branche s’exposant trop aux éléments naturels n’a aucune chance de survie.
Parmis les plantes endémiques de la provence, on y trouve l’astragale de Marseille, la saladelle naine de Provence ou encore la statice à feuilles d’olivier.
L’archipel a toujours été un avant poste militaire stratégique pour la ville de Marseille. D’ailleurs les îles ont appartenues ou partiellement appartenues à l’armée française jusqu’en 1995.
Sous la troisième république (1870-1940) sont édifiés les principaux bâtiments militaire,s encore visibles à l’heure actuelle, notamment le fort du Brigantin, les forts de Ratonneau et de Pomègues, le sémaphore de Pomègues mais aussi le Fort de Caveaux, tout au sud de l’île. ces spots offrant de nombreux spots d’urbex militaires où les graffeurs de Marseille s’en donnent à cœur joie pour le plus grand plaisirs de nos rétines.
Au cours de l’occupation allemande certains édifices sont renforcés, des bunkers sont construits sur Ratonneau où des escaliers descendant dans le sol nous emmènent directement dans ces blocs de béton armé.
D’ailleurs, lors de la libération de Marseille, l’île fut particulièrement bombardée pour permettre l’accès maritime à la ville. Il suffit d’ouvrir les yeux en se promenant sur l’île pour y observer nombre de cratères non naturels.
Nous n’avons pas pu crapahuter dans tous les forts, notamment celui de Brigantin, mais nous avons eu la joie d’explorer le fort de Ratonneau et ses structures largement endommagées par la guerre.
Nous avons même trouvé un escalier descendant à une bonne dizaine de mettre dans la roche pour y trouver des salles vides qui pouvaient servir d’abris lors de bombardements.
Comme beaucoup d’île proche du littoral, elle a aussi servi de lieux de mise en quarantaine pour les marins et voyageurs arrivant d’expéditions lointaines. c’est dans ce contexte que l’hôpital Caroline a été construit entre 1823 et 1828, notamment pour limiter les épidémies de fièvre jaune.
L’isolement en a également fait un lieux de choix pour l’hospitalisation des malades. L’hôpital Caroline est resté en activité jusqu’en 1941.
Sur le Frioul, les endroits attestant de l’activité humaine et surtout militaire sont légions. En plus des édifices cités dans cet article, il existe bon nombre d’aménagements humains, de murs, ou de petit bunkers, visibles de loin et souvent inaccessible tant le paysage est escarpé.
Les endroits à chiner sont nombreux et deux jours ne suffisent pas pour voir toutes les richesses du site, d’autant plus si l’on souhaite prendre le temps de contempler les merveilles de la nature qui s’offrent à nous.
Avis aux amateurs d’histoires, de natures ou aux simples curieux et explorateurs, si vous êtes de passage sur Marseille, je ne peux que vous conseiller de prendre une journée pour vous rendre sur ces bijoux marins !
Je ne peux que vous conseiller de rentrer une fois la nuit tombée afin de contempler un couché de soleil sur le Frioul !
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